dimanche 24 avril 2016

D-day et mémoires



Le 6 juin 1944 a lieu le débarquement Allié en Normandie. Sous le commandement de Dwight Eisenhower 156 000 hommes prennent les plages pour permettre aux forces alliés de mettre pieds en Europe. Mais cette opération est-elle aussi importante que ce que nous semblons croire ?




Le D-Day : un mythe 

 

Pas la peine de revenir en détail sur les événements de la journée. Pour cela il suffit de se rendre sur ce bon vieux : wikipédia
Ici ce qu'il va nous intéresser c'est avant l'histoire de cet événement. Opération de grande envergure le D-Day est présent partout dans la mémoire. Chez les Américains le débarquement est un véritable mythe. De nombreux films ont été fait sur le sujet (Il faut sauver le soldat Ryan, le Jour le plus long ...). Plus, il sature même la mémoire lorsqu'il s'agit de relater une histoire fictive. Dès qu'il y a "débarquement" l'inconscient convoque ces images de la 2e Guerre mondiale (Robin des Bois de Ridley Scott ou Edge Of Tomorrow ...). Même les jeu vidéos y vont de leur reconstitution (Medal Of honor et autres Call Of Duty). On a donc une véritable hypermnésie quasiment involontaire de cet événement outre-atlantique. Pourquoi ?


(Edge of Tomorrow) Bon les gars c'est encore le merdier en Europe. Chaussez vos palmes faut encore qu'on débarque.

D'abord cette bataille apparait comme une prouesse héroïque. Combat dantesque entre d'un côté une alliance qui fait bloc et protège la démocratie et le monde libre (les Alliés) et de l'autre les nazis. La présence et les enjeux sont simples. Mieux, il évince par sa nature un acteur encombrant pour créer ces deux camps : l'URSS.
De plus le prix de cette victoire est faramineuse. On compte 10 500 morts et blessés en un temps restreint. Du coup il devient nécessaire à l'armée américaine de communiquer sur la victoire de son camps. Il faut légitimer le nombre de pertes. Cette victoire (car c'en est une) se transforme en triomphe dans la communication américaine.

Une réalité plus complexe 

 

 Pourtant loin de cet image, le camps allié est beaucoup plus divisé. Ainsi l'objectif des Français (qui ont poussé au débarquement) est de libérer Paris plus que de faire tomber le même IIIe Reich. La 2e DB de Leclerc n'hésitera pas à quitter les colonnes américaines pour se faire.
Bataille de Koursk - été 1943
Les Anglais, tout comme les Américains, ont à coeur de prendre Berlin. La capitale allemande ne doit pas tomber sous l'égide soviétique. En effet  depuis la bataille de Koursk qui eut lieu durant l'été 1943 rien ne semble pouvoir empêcher l'avancée de l'armée rouge. Au début la propagande stalinienne fait de Stalingrad le "coup d'arrêt" de l'avancée allemande. Avec l'arrivée en 1953 de Khrouchtchev au pouvoir c'est la bataille de Koursk à laquelle il a participé qui est mis en avant dans l'histoire russe. Cette bataille devient "le début de la fin". Le débarquement ? Un évènement important mais pas décisif dans la chute du IIIe Reich

La Guerre Froide : fabrique de l'histoire



Captain America au D-Day. Partout sur le globe et dans l'histoire pour latter les ennemis des USA
Ainsi beaucoup d'historiens se sont posés la question de savoir quelle bataille signe la fin du régime nazi. Or comme on l'a vu, selon l'évènement retenu, l'idéologie politique sous-jacente n'est pas la même. Si l'on retient Koursk comme le font depuis les années 50 l'historiographie communiste et marxiste, alors c'est le bloc de l'Est le grand vainqueur. Si au contraire comme le font les anglo-saxon on met l'accent sur le D-Day, ce sont les Alliés. Choisir l'un ou l'autre c'est choisir un camp. Or il est probablement vrai qu'il s'agit des deux dans une certaine mesure. L'existence même de ce débat et de ces deux réponses montrent qu'en fait le conflit de la guerre froide est déjà en germe durant la 2nd Guerre Mondiale. C'est ça qu'il faut retenir de ce débat.
Parce que l'économie nazis c'était quand même naze
Aujourd'hui la plupart des historiens comme Kershaw  ne se posent plus cette question. Comme l'a écrit Clausewitz la réussite d'une guerre ne dépend pas uniquement des faits militaires. Elle est aussi liée au politique au sens large. Or les récentes études historiques se sont questionnézq sur le fait si le IIIe Reich avait la possibilité sur le long terme de soutenir l'effort de guerre gigantesque qu'elle déploie. Economie exsangue, activité prédatrice contre productive, totalitarisme aux effets pervers ...  Tout porte a croire que l'idéologie belliciste nazis n'était tout simplement pas réaliste. La défaite allemande durant la 2e Guerre Mondiale est donc inscrite dans sa simple volonté de faire la guerre. 
Le D-Day apparait aussi comme un événement à l'histoire longue. A l'inverse d'un Iwo Jima côté Pacifique, le débarquement en Europe taille un costume de sauveur, de héros aux USA. Cette figure salvatrice légitime par la suite sa politique de "gendarme du monde", sa doctrine Truman et même les politique plus récente des années 90 (le nouvel ordre mondial).  



Dès lors le D-Day apparait comme un événement historique comme la bataille de Koursk. Mais comme le témoigne leur écriture, ils sont aussi les jalons d'une autre guerre qui se prépare : la Guerre froide.
 

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